Compromis et acte de vente, délais, conditions, état du marché, prix... Voici les clés pour profiter pleinement de la future baisse des droits d'enregistrement à 3% en Wallonie.
Les droits d'enregistrement pour l'achat d'une habitation propre et unique baisseront de 12,5% à 3% en Wallonie au 1er janvier 2025. Cette mesure, annoncée par le nouveau gouvernement régional cet été, permettra à bon nombre de candidats acquéreurs de retrouver plus de pouvoir d'achat.
Cela dit, si l'enthousiasme semble revenir progressivement sur le marché immobilier grâce à cette annonce et des taux plus bas et plus stables, l'attentisme reste de mise. Nous avons donc analysé les effets de cette mesure en dix questions clés.
1) Puis-je déjà faire une offre pour profiter du taux à 3% ?
La mesure n'entrera effectivement en vigueur qu'au 1er janvier 2025, mais l'effet s'est déjà fait sentir sur le comportement des candidats acquéreurs.
Après l'annonce faite en juillet dernier par la coalition MR-Engagés, "les mois d'été ont été encore plus calmes que d'habitude", pointe le notaire Renaud Grégoire. Les offres et signatures des compromis de vente ont été postposées par les acheteurs, qui tentent de profiter du taux plus avantageux. "Les signatures de compromis ont repris progressivement dans le courant du mois de septembre", indique le notaire.
Bien que le gouvernement a acté la mesure à la mi-septembre au cours d'une conférence de presse, "les acquéreurs ne se ruent pas sur le marché, car ils sont toujours dans le doute, par manque d'information", point le CEO de Trevi, Kim Ruysen. L'heure n'est donc pas encore à l'euphorie.
Pourtant, le processus législatif suit son cours, puisque le texte est actuellement en première lecture.
Et même s'il n'était pas voté à temps pour entrer en vigueur le 1er janvier prochain, le ministre-président wallon Adrien Dolimont (MR) a assuré que la mesure s'appliquerait avec un effet rétroactif au 1er janvier 2025.
Vous pouvez donc déjà vous positionner sur une habitation et faire une offre d'achat.
Pour autant qu'elle soit acceptée, vous ne signerez le compromis de vente que dans quelques semaines et ne passerez l'acte de vente qu'en 2025. C'est en effet la date à laquelle l'acte est signé chez le notaire qui compte pour bénéficier du taux à 3% (lire point suivant).
2) Puis-je déjà signer un compromis de vente et bénéficier du taux à 3% ?
Le gouvernement wallon a confirmé début septembre que ce serait la date de l'acte d'achat qui serait prise en compte. Autrement dit, si vous signez un compromis de vente actuellement, vous profiterez du taux plus avantageux, pour autant que votre acte de vente ne soit passé qu'en 2025.µ
En général, le délai entre la signature du compromis et celle de l'acte de vente est de quatre mois. Cela signifie donc que les compromis signés début octobre ne se traduiront en acte notarié qu'en février.
3) Faut-il être primo-acquéreur pour bénéficier du taux de 3% ?
La mesure concerne aussi bien les primo-acquéreurs que les acquéreurs qui souhaitent acheter une nouvelle habitation, pour autant qu'ils vendent la précédente.
En effet, ce taux réduit porte sur l'achat d'une habitation "propre et unique". Cela peut concerner un premier achat, un second, un troisième, un quatrième et ainsi de suite, tant que vous n'êtes propriétaire que d'une seule habitation.
Cela signifie que vous ne devez pas disposer de la totalité en pleine propriété d'un immeuble affecté ou destiné en tout ou en partie à l'habitation. Vous pouvez par contre bénéficier des droits d'enregistrement à 3% si vous posséder par ailleurs un terrain, un bâtiment commercial, un garage, etc.
Une habitation est considérée comme propre, à condition d'y installer sa résidence principale, donc "par une inscription au regsitre de la population ou au registre des étrangers", explique le cabinet du ministre-président wallon Adrien Dolimont.
4) Quid si je n'ai pas vendu ma première habitation au moment de signer l'acte ?
Dans ce cas, "par dérogation, le taux de 3% est octroyé si cette habitation déjà possédée est revendue dans les trois ans à compter de l'acte d'acquisition de la nouvelle habitation. Il convient de s'engager dans l'acte d'acquisition à revendre l'ancien bien dans ce délai. Un contrôle sera effectué par l'administration à l'échéance pour s'assurer que celui-ci aura bien été vendu", explique le cabinet du ministre-président.
Dans le cas contraire, le contribuable devra payer des droits d'enregistrement complémentaires d'un montant égal à la différence entre le taux ordinaire de 12,5% et le taux réduit à 3%. Ainsi, pour une maison de 450.000 euros, l'acquéreur qui a payé 13.500 euros de droits d'enregistrement (3%) mais qui ne vend pas son ancienne habitation dans un délai de trois ans devra payer 42,750 euros (56.250 euros - 13.500 euros).
5) Pourrai-je encore profiter du chèque-habitat ?
Non, le chèque-habitat, tout comme les différents abattements sur les droits d'enregistrement, ne seront plus octroyés une fois le taux à 3% entré en vigueur, autrement dit pour les actes d'achat signés à parit du 1er janvier 2025.
Les actuels bénéficiaires de cet avantage fiscal ne sont pas concernés par la suppression du régime. Ils conservent donc l'avantage pour les années d'emprunt qui restent à courir, sauf en cas de vente du bien.
6) Dans quels délais doit-je m'installer dans l'habitation ?
Il convient de s'établir dans votre nouvelle habitation dans un délai de trois ans s'il s'agit d'une habitation existante ou cinq ans s'il s'agit d'un terrain à bâtir sur lequel est ensuite construite votre habitation.
7) Combien d'années dois-je rester dans l'habitation pour bénéficier de la réduction ?
Vous devez rester trois années entières dans l'habitation à compter de votre installation (date de la domiciliation). "Si vous quittez le bien avant l'expiration de ce délai, il faudra payer des droits d'enregistrement complémentaires d'un montant égal à la différence entre le taux ordinaire à 12,5% et le taux réduit à 3%", prévient le ministre-président wallon.
8) Sera-t-il plus facile d'obtenir un crédit hypothécaire ?
La différence entre l'ancien taux avec abattement fiscal et le nouveau taux des droits d'enregistrement permet, dans la plupart des cas, de réduire les frais liés à l'achat d'un bien immobilier. Par exemple, pour une maison de 350.000 euros, les droits d'enregistrement payés en 2025 s'élèveront à 10.500 euros, alors que les acquéreurs auraient dû s'acquitter de 38.750 euros dans le système actuel. L'économie fiscale à l'achat s'élève ainsi à 28.250 euros.
Les banques demandant traditionnellement 10% à 20% de fonds propres pour l'achat d'une habitation propre, sans compter les frais annexes, "cette mesure permettra à bon nombre de ménages d'avoir un apport financier supérieur et donc un meilleur dossier auprès des banques.
Autrement dit, cela soutient l'accès au crédit hypothécaire", analyse Ludovic Guiot, directeur du réseau Honesty.
9) Les prix de l'immobilier vont-ils augmenter ?
Les agents immobiliers s'accordent sur le fait qu'il est trop tôt pour s'avancer. "En théorie, on pourrait s'y attendre, mais dans la pratique, ce n'est pas forcément le cas, si on regarde ce qui s'est passé en Flandre ces dernières années", pointe Raphaël Mathieu, CEO de WeInvest.
Kim Ruysen abonde en ce sens : "Les prix en Flandre on augmenté en moyenne de 3% depuis la baisse des droits d'enregistrement de 6 à 3% en 2022.
Si on les compare aux prix bruxellois et wallons, la tendance est similaire sur cette même période. On ne peut donc pas conclure qu'un allègement de la pression fiscale induit une hausse de prix".
10) Comment se portera le marché immobilier en 2025 ?
Pour les agents, même si la mesure est profitable aux acquéreurs, "elle ne chamboule pas le marché" pour autant, relève Sébastien Nyssens, responsable de l'agence Latour&Petit à Wavre. "Ceux qui avait un projet d'achat mûr sont enclins à le concrétiser et veulent profiter de la baisse des droits d'enregistrement, tant que les prix stagnent et que les taux d'emprunt baissent.
Mais la tendance n'est pas à l'euphorie. Ce n'est pas en quelques semaines qu'on concrétise un projet, qu'on décide de vendre et/ou d'acheter".
Tout au plus, la mesure permettra de redynamiser un marché immobilier qui tourne au ralenti depuis près de deux ans, selon les agents interrogés.
"Les propriétaires voient également la mesure comme un signal positif pour la mise en vente, car dans ces conditions plus intéressantes, cela devrait accélérer les ventes", pointe Ludovic Guiot.
L'écart avec la TVA à 21% inquiète
La baisse des droits d'enregistrement de 12,5% à 3% est accueillie positivement par les agents immobiliers, mais creuse l'écart avec la TVA à 21%, appliquée sur l'immobilier neuf.
"La différence de taux est colossale. Cela rend le neuf encore moins attractif alors que les objectifs climatiques poussent les propriétaires à vivre dans des habitations durables", soulève le CEO de Trevi, Kim Ruysen. "Le prochain gouvernement fédéral devra réduire cette différence de taux, dans le cas contraire, le marché neuf sera encore confronté à des années difficiles".
Mathilde Ridole - L'Echo 23/10/2024